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Wikibardig:Zones d'expansion de crues (ZEC)

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Sommaire

Zones d'expansion de crues (ZEC)

Les zones d'expansion de crue (ZEC) relèvent du concept de ralentissement dynamique (Chastan, 2004) qui intègre un certain nombre de mesures de gestion et d'ouvrages en amont des bassins versants pour réduire les crues en aval. "Une zone d'expansion des crues est un espace naturel ou aménagé où se répandent les eaux lors du débordement des cours d'eau dans leur lit majeur. Le stockage momentané des eaux écrête la crue en étalant sa durée d'écoulement" (Degoutte G., 2012, p.15). Une zone d'expansion de crue devrait en théorie être une zone non habitée et réservée à cet usage, c'est le cas entre autres de "polders" sur le Rhin ("polders" d'Erstein et de la Moder coté Français).

On peut distinguer :

  • des zones d'expansion de crues naturelles (sans ouvrages ; le cours d'eau est dans son état non aménagé),
  • des zones protégées par des digues, mais ayant à l'échelle du bassin versant une fonction d'expansion de crues,
  • des zones situées en amont de barrages pouvant à la différence des précédentes être surinondées par rapport à la situation en absence de l'ouvrage.

Les ZEC du second type ci-dessus sont celles qui font le plus parler d'elles compte tenu des enjeux particuliers… Dans la réalité, en France, compte tenu de l'occupation des sols, il s'agit, comme sur le Rhône, de zones rurales habitées, protégées des crues fréquentes par des digues, mais pour un niveau moindre que d'autres zones protégées sur le même cours d'eau, plus densément habitées. En fonction du niveau de la crue une zone pourra ou non être mobilisée, ce qui est d'ailleurs le cas de tout le lit majeur.

Mouzon.jpg

Figure : La zone de ralentissement dynamique des crues (ZRDC) de Mouzon, de type "barrage" (Source EPAMA).

L'expansion de crues est indispensable à l'échelle d'un bassin versant, on peut même dire que l'état naturel d'un cours d'eau est l'expansion de crue… La "création" de zones réservées à cet effet n'est nécessaire que parce que l'homme a artificialisé le cours d'eau et aggravé les crues en retirant du lit majeur une partie plus ou moins importantes de celui-ci pour l'expansion des crues. Les grandes crues historiques ont elles-mêmes, comme sur la Loire moyenne, avec des centaines de brèches sur les trois crues de 1846, 1856 et 1866, remobilisé des zones "protégées" pour épandre les crues qui ne pouvaient physiquement pas transiter vers l'aval.

Une ZEC diminue le niveau de la crue en son aval. La limite d'action d'une ZEC est lié au volume qui peut y être stocké, et va limiter son temps de remplissage et donc son effet. Pour les crues longues la difficulté de recourir à des zones d'expansion de crue est donc que leur mobilisation devra avoir lieu au moment le plus opportun de la crue (pointe), ce qui implique de bien caler le début de remplissage.

La différence entre les ZEC aménagées avec des digues de protection, tels les "polders" du Rhin ou les ZEC du Rhône aval et les ZEC de type bassin de surstockage (exemple la ZRDC de Mouzon de l'EPAMA, présentée Figure ci-dessus.) est que ces dernières peuvent inonder une surface plus importante que la crue naturelle. On peut donc parler, dans ce dernier cas uniquement, de sur-inondation par rapport à l'inondation naturelle, à la fois en termes de surface inondée mais aussi de hauteur. Les deux types de ZEC faisant appel à des ouvrages inondent plus longtemps, sauf dispositif particulier de ressuyage permettant d'accélérer la vidange après la crue. Pour éviter les inconvénients liés aux sur-inondations ou aux durées d'inondation accrues, on peut très bien concevoir des digues de protection rapprochée des enjeux les plus importants d'une ZEC pour protéger ceux-ci des crues mobilisant la fonction d'expansion de crue, celles-ci devront être aussi bien, sinon mieux, surveillées et entretenues que les digues de premier rang.

Afin d'optimiser les niveaux de protection dans une zone d'expansion de crues, on s'appuiera utilement sur des analyses coûts-bénéfices (Grelot F. et al., 2009) pour déterminer (optimiser) le niveau de protection d'une ZEC de type zone protégée par des digues. Cette analyse pourra être conduite à deux échelles, celle de la ZEC elle-même et celle du bassin versant. Les résultats des analyses coûts-bénéfices pourront à leur tour être utilisés dans des analyses multi-critères faisant intervenir d'autres facteurs non monétaires. Dans le cadre du plan Rhône, un projet d'optimisation de la protection de la ZEC de Boulbon-Vallabrègues (Degoutte G., 2012, p.31), en amont immédiat de Tarascon est en cours d'études ; de nombreux facteurs, hydrauliques, analyse de risques et autres sont pris en considération.

Éloigner les digues des cours d'eau a de nombreux avantages, dont celui de remobiliser des zones d'expansion de crue naturelles, jusqu'alors perdues (sauf en cas de brèche, mais c'est alors à la fois aléatoire et dangereux). Au delà de cet aspect, les sollicitations sur les digues, tant en termes hydrauliques que morphologiques et donc d'érosion (CIRIA, 2013, section 7.3) vont diminuer et conduire à des digues plus sûres, et même éventuellement moins hautes. C'est le principe retenu par la "troisième correction" du Rhône Suisse, qui prône l'élargissement du lit entre digues, en plus du renforcement des digues et la mise en place de digues résistant à la surverse et de digues de second rang. Les espaces de mobilité du cours d'eau permettent une diminution des risques mais aussi de rétablir aussi un espace plus naturel, dans un souci d'amélioration de l'environnement et de la biodiversité.

Rappel des liens accessibles sur cette page :


Références

Chastan B. (Coord.), 2004. Le ralentissement dynamique pour la prévention des inondations : guide des aménagements associant l’épandage des crues dans le lit majeur et leur écrêtement dans de petits ouvrages. Ministère de l'Écologie et du Développement Durable, Cemagref, 129 p.

CIRIA, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (MEDDE), United States Army Corps of Engineers (USACE), 2013. International Levee Handbook (ILH), 1350 p. http://www.ciria.org/ILH

Degoutte G. (Coord.), 2012. Les déversoirs sur digues fluviales. Éditions Quae, 184 p.

Grelot F., Bailly J.-S., Blanc C., Erdlenbruch K., Mériaux P., Saint-Geours N., Tourment R., 2009. Sensibilité d'une analyse coût-bénéfice - Enseignements pour l'évaluation des projets d'atténuation des inondations. Ingénieries eau-agriculture-territoires. Lavoisier, 2009, Spécial Inondations, 95-108.

Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (MEDDE), 2015. Référentiel technique digues maritimes et fluviales, 190 p. Le téléchargement sera disponible ultérieurement.

Tourment R., Degoutte G., Patouillard, S. - 2015. Digues, canaux de dérivation ou zones d'expansion de crues ?. Géologues, n° 184, p. 20-26


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