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Nappes captives

De Wikigeotech

Nappes captives profondes multicouches


En général, une nappe captive multicouche n'est pas enfermée dans un aquifère isolé : elle est en liaison hydraulique plus ou moins forte avec les aquifères situés au dessus et au dessous dont elle est séparée par des formations peu perméables (les épontes). Telles sont par exemple les nappes captives et profondes du bassin nord-aquitain qui s'écoulent au sein d'un vaste complexe multicouches comprenant 15 aquifères superposés (et exploités) séparés par 14 épontes, l'ensemble allant du Plio-Quaternaire au Jurassique moyen.


Des échanges de flux plus ou moins importants suivant le degré d'imperméabilité des épontes et leur épaisseur (voire leur disparition en certains secteurs) peuvent se produire par drainance entre la nappe captive considérée et la nappe située au dessus et celle située au dessous. Il peut exister différentes configurations d'échanges de flux par drainance suivant les différentiels de pression entre nappes : la nappe captive peut recevoir de l'eau en provenance soit de l'aquifère supérieur, soit de l'aquifère inférieur, soit des deux, mais elle peut aussi fournir de l'eau aux aquifères encadrant (alors même qu'elle peut être en déséquilibre).


La nappe captive peut aussi bien sûr être alimentée par les précipitations au niveau des affleurements de la formation géologique qui la contient. L'importance de cette alimentation directe sera fonction de la superficie des affleurements. Pour certains aquifères, les affleurements sont réduits, rendant la nappe profonde tributaire des flux de drainance pour le maintien de son équilibre si elle est exploitée. Si les épontes supérieure et inférieure sont très peu perméables, les flux de drainance seront très réduits et des prélèvements excédant la recharge par les affleurements conduiront à une situation de surexploitation.

L'évaluation de la ressource disponible doit donc prendre en compte non seulement la recharge par infiltration au niveau des affleurements de l'aquifère, mais aussi la recharge à partir des affleurements des autres aquifères du système ainsi que les flux de drainance et seule une modélisation du système multicouches peut permettre de quantifier ces flux et d'apprécier la conséquence des prélèvements opérés.

Contrairement à un aquifère à nappe libre, un aquifère à nappe captive est caractérisé par une forte diffusivité (rapport perméabilité sur coefficient d'emmagasinement) qui la rend très réactive à des modifications de son régime hydrodynamique, en particulier à une augmentation ou à une réduction des prélèvements. Réactivité que la figure ci-dessous illustre bien dans le cas de la nappe captive de l'Eocène moyen en Gironde. Les résultats proviennent du modèle nord-aquitain (MONA) utilisé depuis 1998 pour gérer la ressource en eau du multicouches nord aquitain. Cette figure montre l'évolution des niveaux sur la période 1975-2007 (avec superposition des niveaux calculés, en moyenne annuelle, aux niveaux observés) puis l'évolution des niveaux de 2008 à 2030 pour différents scénarios de prélèvements. 

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Figure 1 : Simulation des niveaux de la nappe de l'Eocène moyen en Gironde (source : Rapport public BRGM/RP-60416-FR)

Les scénarios 4, 5, 6, 7 correspondent à différentes mesures envisagées à plus ou moins long terme pour réduire les prélèvements dans l'Eocène. Le scénario 1 (SIM1) correspond au scénario dit tendanciel (aucune économie d'eau n'est faite, la simulation porte uniquement sur l'accroissement des prélèvements AEP lié à l'augmentation prévue de la population. Les niveaux baissent continûment, traduisant l'augmentation régulière des prélèvements. Le scénario 8 (SIM8), purement théorique, correspond quant à lui à l'arrêt de tout prélèvement et illustre bien la réactivité de la nappe. Les niveaux remontent très rapidement (2008-2010) puis amorcent une stabilisation à partir de 2012, la mise en équilibre se faisant beaucoup plus lentement, à partir de 2015, sur une période d'une dizaine d'années.


Ce scénario 8 montre la réactivité d'une nappe captive dans un premier temps mais aussi la lenteur de la mise à l'équilibre liée aux "réajustements" beaucoup plus longs des flux de drainance (inertie du système multicouches). Ce qui est vrai pour une remontée des niveaux le sera aussi pour une baisse occasionnée par un accroissement temporaire des prélèvements.
L'équilibre hydrodynamique d'une nappe captive, dont le régime initial a été modifié plus ou mois durablement par des prélèvements, se met en place par une double réaction se déroulant sur deux échelles de temps : une réaction de la nappe elle-même, relativement rapide (par transfert de pression), et une réaction du système multicouches, auquel elle peut être plus ou moins liée hydrodynamiquement, reportant l'atteinte de l'équilibre sur le long terme.

Ainsi il est possible que les niveaux baissent alors que les prélèvements n'augmentent plus. Il s'agit d'un état transitoire précédant le retour à l'équilibre, équilibre qui sera atteint au bout d'un temps plus ou moins long en fonction de l'inertie du système multicouches. Cet équilibre doit être atteint à des niveaux permettant d’atteindre les objectifs de qualité écologique des eaux de surface associées fixés à l'article 4, d'éviter toute diminution significative de l'état écologique de ces eaux et d'éviter toute dégradation significative des écosystèmes terrestres associés.

Seule une modélisation est en mesure de fournir une indication quant au temps nécessaire au retour à l'équilibre (hors tendances naturelles) et aux niveaux correspondant à cet état d'équilibre.


BRGM, synthèse réalisée par --Jean-Jacques Seguin 24 juin 2012 à 15:27 (CEST)


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